Les PME suisses ont la réputation de rater le coche de la numérisation. Trois exemples montrent que de nombreuses petites entreprises se numérisent parfaitement, mais seulement là où l’opération est rentable et réellement intéressante.
L’opinion est tenace: les PME suisses ratent le coche de la numérisation. Elles manquent le train du futur. Mais le constat est-il exact? L’opinion ne serait-elle pas plutôt un préjugé? Swisscom a voulu en savoir plus et s’est rendue chez trois PME issues de trois branches très différentes. Le résultat: la numérisation est un sujet de préoccupation majeur car il modifiera en profondeur l’approche de la collaboration. Le sujet est abordé de manière très pragmatique et peu spectaculaire mais il est mis en œuvre en tenant compte de ce qui est faisable.
Numériser lorsque cela s’avère intéressant: la boulangerie Abderhalden
La boulangerie Abderhalden est une entreprise familiale. Le grand-père, Ueli Abderhalden, monte une petite boulangerie à Wattwil en 1931. Aujourd’hui, au bout de trois générations d’Abderhalden, beaucoup de choses ont changé. Au premier rang desquelles les habitudes alimentaires. «Les sandwiches représentent une part importante de notre activité», souligne Gregor Menzi, le propriétaire de la boulangerie Abderhalden AG. «A l’heure actuelle, notre boulangerie est bien plus une enseigne de restauration rapide qu’une boulangerie classique.» Le comportement de la clientèle qui a évolué a exigé une autre manière de diriger l’entreprise et la numérisation joue un rôle de premier plan dans ce domaine. Le marketing et le recrutement s’effectuent uniquement en ligne. Les 40 collaborateurs s’organisent numériquement. «Nous publions les plans de service six semaines à l’avance. Nos collaborateurs s’informent sur une application spéciale», déclare M. Menzi. «Ce service est très apprécié et nous évite des montagnes de copies. Chaque employé est au bon endroit au bon moment.»
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Il est clair que M. Menzi mise aussi sur des outils modernes dans le reste de l’entreprise: le catalogue des produits est entièrement numérisé, il est possible de savoir à tout moment ce qu’achètent les clients. Le système de commande numérisé est étroitement associé au catalogue. Et beaucoup de choses ont aussi changé dans la fabrication. «Une balance numérisée qui contient les recettes pèse la pâte. La balance dit ce qu’il faut ajouter et dans quelles quantités», explique M. Menzi. Si une erreur se produit, la pesée ne peut se poursuivre et il faut corriger l’erreur. C’est un avantage non négligeable à notre époque marquée par une pénurie de main-d’œuvre. «Compte tenu de nos horaires de travail, il est difficile de trouver suffisamment de personnel qualifié», déclare le patron de la boulangerie. La technologie et la numérisation pourraient également résoudre ce problème un jour, du moins on l’espère. «Pour nous, ce serait déjà un avantage énorme si nous pouvions commencer à cinq heures plutôt qu’à trois heures du matin.» Seul un détail important n’a pas changé depuis l’époque d’Ueli Abderhalden: la pâte repose toujours 24 heures avant qu’elle ne soit travaillée. Certaines choses ne deviennent pas meilleures juste parce qu’elles peuvent être faites plus rapidement.
Arrêté par la branche: Renovation-Bern AG
L’entreprise Renovation-Bern AG, une start-up fondée par Yannick Hediger et Jan Junker, existe depuis huit ans. Les deux trentenaires se décrivent eux-mêmes comme des «digital natives». Il va de soi qu’ils mettent aussi en œuvre la numérisation dans leur entreprise de construction. Tout du moins dans la mesure du possible. «Nous voulions en fait très rapidement optimiser des processus, introduire le Lean Management et utiliser des solutions basées sur le cloud, pour travailler mais aussi pour sauvegarder des données», explique Yannick Hediger. Cependant, ils n’ont pas trouvé de solution de branche adaptée capable de répondre à toutes les exigences: la saisie d’offres en temps réel et indépendamment du lieu (par exemple sur des tablettes), la planification des interventions et des ressources, qui se fait actuellement quels que soient les appareils, le traitement des factures associé à la comptabilité et la saisie mobile du temps de travail, le tout sous un seul et même toit.
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Les entrepreneurs se servent donc d’une solution de deuxième rang et cherchent ponctuellement des alternatives. La planification des interventions des quelque 50 collaborateurs a lieu de manière entièrement numérique. Chaque département et chaque équipe dispose de son propre calendrier Outlook qui est continuellement synchronisé avec les téléphones portables. Jusqu’à présent, la synchronisation fonctionnait mieux sur Apple, si bien que tous les collaborateurs ont des iPhone que l’entreprise leur fournit. Les photos est les fichiers sont partagés sur Dropbox et les employés continuent bien sûr de se téléphoner. «Le logiciel de traitement et la comptabilité continuent malheureusement d’être gérés localement sur un serveur», déclare M. Hediger. Les collaborateurs arrivent au bureau le matin et savent déjà de quoi sera fait leur travail du jour ou de la semaine, car ils trouvent toutes les informations nécessaires sur leur téléphone portable. Le service interne les planifie minutieusement la semaine précédente, avec tous les détails et toutes les coordonnées. Les chats de groupe WhatsApp sont aussi largement utilisés. Pas toujours uniquement pour le travail, il faut bien rire de temps à autre.
«Chez nous, les informations deviennent relativement vite obsolètes, si bien que des informations constamment actualisées constituent un avantage concurrentiel central, préviennent les passages à vide et minimisent le taux d’erreur», souligne M. Hediger. Mais tout cela fonctionne-t-il aussi avec des smartphones sur le chantier, où de nombreux collaborateurs ne sont pas des «digital natives»? «C’est clair», rit Jan Junker. «Presque tout le monde à un smartphone dans sa vie privée à l’heure actuelle, mais nous proposons un crash course pour ceux qui n’en ont pas. Seule la taille de la police de caractères doit être augmentée pour certains collaborateurs en raison de leur âge.»
Animé par la branche: Garage Fischer AG
Il est inconcevable pour Peter Fischer, le propriétaire du Garage Fischer AG de Dietikon, que la branche soit un frein comme dans le dernier exemple. Bien au contraire: «Les deux marques que notre entreprise représente, Peugeot et Mitsubishi, avancent depuis longtemps extrêmement rapidement en matière de numérisation.» Des PME de taille médiane telles que celle de M. Fischer, qui emploie un peu plus de dix personnes, sont tenues de mettre en œuvre les directives des marques. «D’un côté, c’est super, car notre entreprise est dans l’air du temps de cette manière», souligne M. Fischer. A titre d’exemple, la prise en charge numérique de la clientèle est excellente à l’initiative des marques: les clients sont informés des révisions ou d’autres échéances par SMS et les données détaillées des clients permettent une approche ciblée.
Mais il y a un hic: «Ceux qui, comme nous, représentent deux grandes marques, doivent avoir deux systèmes, ce qui donne lieu à un surcroît de travail», explique M. Fischer. La charge de travail et l’avantage occupent de toute façon le devant de la scène pour M. Fischer lors de toute réflexion sur la numérisation: «Nous travaillons depuis longtemps avec notre logiciel de branche. Il a fait ses preuves, il n’y a pas de problème.» Toutefois, il faudrait maintenant aussi numériser l’atelier lui-même. N’importe quelle voiture recèle de l’électronique à l’heure actuelle. «A l’atelier, nous utilisons des ordinateurs portables modernes, mais on identifie tout de suite le problème fondamental en les regardant», ricane M. Fischer. L’ordinateur portable est sale et il est exposé aux travaux de mécanique sans ménagement. Mettre une tablette entre les mains des mécaniciens automobiles pour qu’ils saisissent leur temps de travail de manière numérisée ne fonctionne par exemple pas encore au mieux pour des raisons purement pratiques. «Rapidement abîmés, faible rentabilité», comme le résume si bien M. Fischer. Le diable se cache parfois dans les détails: «Si quelqu’un commande un changement de roues sur le formulaire en ligne et s’il veut ensuite un changement de pneus, toute notre planification s’en trouve chamboulée. Une méprise qui n’est pas rare pour des néophytes. Nous préférons alors prendre rendez-vous par téléphone», affirme M. Fischer.
Y a-t-il de la valeur ajoutée? La conversion en vaut-elle la peine? M. Fischer se pose ces questions sur toutes les problématiques numériques. Sites Internet, réseaux sociaux, prise en charge en ligne, télémaintenance: tout cela engendre en fin de compte un surcroît de travail qu’il n’est pas encore possible de compenser, ou seulement difficilement. «Les fournisseurs sont très numérisés mais de telles conversions ne valent souvent pas le coup chez nous à l’atelier et en vente.»
Numérisation: oui, si ça rapporte
Trois exemples, trois approches différentes. Une PME absolument consciente des traditions mise ici pleinement sur la numérisation et ça lui réussit. Une start-up voudrait se numériser mais elle ne le peut pas, parce que la branche ne joue pas encore le jeu. Et voici la PME qui n’a pas d’autre choix que de se numériser. Les trois entreprises connaissent le succès. Des PME suisses efficaces et parfaitement adaptées aux circonstances. La numérisation n’est ici qu’un puzzle de plus. Rien de plus, mais rien de moins non plus.